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DÉCEMBRE 2021

LA FABRICATION DES CHANDELLES

     C’est plus particulièrement durant les mois de novembre et de décembre qu’on renouvelait la réserve annuelle de chandelles. Cela s’explique aisément, car à cette époque de l’année on faisait boucherie, c’est-à-dire qu’on tuait les moutons, les porcs et les bœufs pour constituer les provisions d’hiver. Cette opération permettait de séparer le gras des parties comestibles des animaux.

     Une fois le « temps des boucheries » terminé, on rassemblait le gras d’animal et on le faisait d’abord bouillir dans un grand chaudron. Lorsque la graisse était chaude, donc liquide, on filtrait ce bouillon pour éliminer le plus possible les nerfs, les tissus, les poils qui s’y trouvaient. On obtenait alors un liquide opaque et de couleur blanche. L’étape suivante, soit la fabrication comme telle de la chandelle, pouvait s’effectuer de deux façons.

Deux méthodes de fabrication

     La première et la plus rudimentaire s’appelait la méthode du sauçage. Elle était, dit-on, très employée chez nous. Ainsi, après avoir attaché une série de cordes de coton autour d’un bâton de bois, on plongeait les cordes à deux ou trois reprises dans le suif chaud jusqu’à ce qu’elles soient bien raides. Une fois cette partie centrale en place, il ne s’agissait plus que de répéter l’opération ― tremper et laisser sécher ― jusqu’à ce que la chandelle soit assez épaisse pour se tenir debout sans plier. À ce moment-là, on n’avait qu’à détacher l’extrémité reliée au bâton, et le tour était joué. Si on souhaitait obtenir des chandelles plus épaisses, on prolongeait le sauçage, et le diamètre s’agrandissait.

     Le second procédé reposait sur une technique totalement différente, soit le moulage. On utilisait dans ce cas des tubes de tôle regroupés en ensembles de 2, 4 ou 6 sur un pied commun. Le fond de ces tubes comportait un petit trou. La partie supérieure, elle, était ouverte et se prolongeait sous forme d’assiette métallique destinée à recevoir le liquide.

     On commençait d’abord par introduire une mèche par le petit trou situé au bas du moule. On fermait ensuite cet orifice par un nœud. Puis, on tendait ces mèches au moyen d’un bâtonnet qu’on disposait en travers du moule. On versait alors la graisse liquide dans chacun des tubes. Après le temps normal de refroidissement, on répandait un peu d’eau chaude sur le moule, on coupait les nœuds inférieurs et on secouait. De belles chandelles bien dessinées glissaient alors des moules. Un nettoyage de la mèche et de la base complétait l’opération. Comme les chandelles de suif attiraient la vermine, on avait l’habitude de les ranger dans des boîtes de tôle.

     Il était également d’usage d’offrir au curé de la paroisse une certaine quantité de chandelles. Ces dernières servaient à éclairer l’église tout au long de l’année. De la même façon, on en mettait de côté une quantité pour les vieux parents qui habitaient très souvent le village.

     S’étant départis de leur ferme au profit de leurs plus jeunes, les parents comptaient sur leur progéniture pour leur fournir leur provision annuelle de chandelles.

Extrait de « Les coutumes de nos ancêtres », auteur Yvon Desautels,
autorisé par l’éditeur Éditions Paulines, 1984/médiaspaul www.mediaspaul.ca