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Janvier 2019

LE JOUR DE L’AN

 

     Ordinairement, la veille du Jour de l’An, c’était la coutume de courir « la guignolée ».  Cette activité réunissait un petit groupe de vaillants paroissiens qui visitaient une par une chaque maison des rangs et du village, pour recueillir des dons de toute sorte destinés aux pauvres de l’endroit.

      Les guignoleux, comme on les appelait, s’amenaient, armés de longs bâtons et de sacs profonds. Souvent précédés par un cortège d’enfants qui en annonçaient l’arrivée prochaine, les joyeux lurons s’arrêtaient sur le seuil de la maison et entonnaient leur gai refrain, battant la mesure avec leurs bâtons. Ils chantaient :

Bonjour le maître et la maîtresse
Et tous les gens de la maison,
Nous avons fait une promesse
De v’nir vous voir une fois l’an.
Une fois l’an, ce n’est pas grand’chose
Qu’un petit morceau de chignée,
Un petit morceau de chignée
Si vous voulez.

     Le père de famille les invitait alors à entrer pour se réchauffer et leur offrait une collation et le petit coup traditionnel. Puis on leur remettait les dons, souvent des produits de la ferme, qu’ils plaçaient dans un grand sac installé dans leur berlot. Et le cortège repartait dans le tintamarre des grelots et des cris d’enfants.

     Le Jour de l’An même, les célébrations débutaient très tôt. Au lever du soleil, toute la parenté se rendait chez les grands-parents pour leur souhaiter « la bonne année ». À la maison paternelle, une table bien garnie attendait les visiteurs matinaux.

Bénédiction paternelle 

     Dès son arrivée, le fils aîné et toute la famille avec lui s’agenouillaient respectueusement devant le vieux père. On lui demandait alors la bénédiction du premier de l’an. Le patriarche, toujours très ému, étendait les mains au-dessus de la tête de ses enfants et de leur descendance. Puis, on échangeait les bons vœux pour l’année qui commençait. La formule se terminait presque toujours par « Et le paradis à la fin de tes jours ! ».

     À cette époque, il était d’usage d’offrir et de recevoir des cadeaux le Jour de l’An. Sauf dans les familles très aisées, les présents étaient modestes et surtout pratiques. On offrait du linge, des fruits, parfois des bonbons ou des jouets aux plus jeunes.

     Comme le Jour de l’An était une fête religieuse, de bonne heure, tout le monde se mettait en route vers l’église pour souhaiter la bonne année aux connaissances et amis qui ne manqueraient pas de se trouver sur le  perron de l’église avant la grand-messe. Et foule il y avait. Parés de leurs plus beaux atours, le sourire aux lèvres, les gens s’échangeaient bises et poignées de main tout en se souhaitant les meilleures choses du monde.

     Après l’office religieux commençait la ronde des visites du Jour de l’An. D’abord  la parenté, puis les amis et les connaissances.

     Privilège des hommes, les visites duraient toute la journée. Certains, raconte-t-on, pouvaient en faire jusqu’à 80. Le scénario se résumait ainsi. Le visiteur, tout endimanché évidemment, se présente à la porte. La maîtresse de maison l’accueille et l’invite à passer au salon où patientent ses filles. On échange bons vœux et aussi les petits bécots auxquels les femmes seraient malvenues de se dérober. Le premier de l’an, elles doivent embrasser tout le monde. Suivent le petit coup de « fort » (alcool) d’usage et une légère collation. Et le visiteur prend congé.

     À la fin de la journée, lorsque ces messieurs sont de retour chez eux, ils doivent raconter aux dames tout ce qui s’est passé. C’est le moment où on échange les nouvelles qu’on a apprises et qu’on se raconte les bons tours qu’on a joués. Tout cela sous le signe de la gaieté.

Extrait de « Les coutumes de nos ancêtres », auteur Yvon Desautels,
autorisé par l’éditeur Éditions Paulines, 1984/médiaspaul


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