Décembre 2018
LA FÊTE DE NOËL
Pour nos arrières grands-parents, la fête de Noël revêtait une importance sans pareille. Événement d’abord spirituel, on n’oubliait pas pour autant que la visite allait s’amener et qu’il fallait être prêt. Vers le 8 décembre, ou dès que la froidure s’installait, on « faisait boucherie », c’est-à-dire qu’on tuait les animaux nécessaires pour la préparation de la « mangeaille » propre à cette occasion : les volailles, les oies, les dindes, les cochons, les moutons élevés depuis le printemps et engraissés durant l’été.
Cette opération pouvait s’étendre facilement sur une période de trois à quatre jours. Puis, les femmes se relayaient autour de la cheminée ou du poêle afin de confectionner les plats les plus variés.
On préparait du boudin, des saucisses, des cretons, du jambon, du pâté de tête, des beignets, des croquignoles, des crépinettes, des palerons, des plarines, des tourtières, du ragoût de pattes, de la tête en fromage, des tortasseries, etc. Comme les réfrigérateurs n’existaient pas, toute cette boustifaille était entreposée dans la cuisine d’été, petite pièce attenante à la maison, mais qu’on ne chauffait pas l’hiver.
Après les boucheries, on s’attaquait à la fabrication des chandelles à partir du gras animal inutilisé. La réserve du luminaire ainsi constituée servait à éclairer l’habitation et aussi l’église paroissiale lors de la messe de minuit. Quelques jours avant Noël, il était d’usage de faire la cueillette de ces chandelles, cueillette à laquelle chaque maisonnée contribuait généreusement.
Attente joyeuse
Puis arrivait la fameuse veille de Noël. Toute la soirée, on s’affairait, dans un climat d’attente joyeuse, en préparatifs de toutes sortes. Vers les neuf heures, les hommes sortaient pour aller atteler les berlots et les carrioles, pendant que les jeunes montaient se coucher et que les femmes achevaient de se pomponner. Rappelons que jusque vers quatorze ou quinze ans, on n’allait pas à la messe de minuit. C’était le privilège des plus âgés. Souvent la maman restait au foyer avec les plus jeunes, et le reste de la famille partait en petit groupe. Tous étaient soigneusement emmitouflés dans leurs « capots de drap ou de chat » les pieds posés sur des briques chaudes et enveloppés de peaux ou de couvertes de laine. Et le cortège s’élançait dans la nuit sombre et froide. Destination : l’église du village.
Après avoir salué toutes les connaissances sur le perron, on pénétrait dans le temple paroissial illuminé de mille chandelles, décoré, astiqué. À minuit, le curé entonnait les prières liturgiques, et un chantre à la voix forte suivait avec le traditionnel « Minuit, chrétiens ». Pendant les trois messes qui étaient alors d’usage, se succédaient les beaux cantiques de Noël que nous connaissons tous : Les anges dans nos campagnes, Ça bergers, Dans cette étable…
De retour la maison, on commençait le réveillon. À cette époque, on ne donnait pas les cadeaux à Noël, mais au jour de l’An. Et la coutume des arbres de Noël n’était pas aussi répandue qu’aujourd’hui.
Au réveillon, on invitait la parenté, souvent les voisins. On mangeait avec appétit et ce, pendant longtemps. Puis le groupe s’animait.
Les conteurs d’histoires se mettaient à l’oeuvre, interrompus très souvent par les danseurs et les gigueurs. On s’amusait ainsi jusqu’au lever du soleil.
Cette première veillée était suivie par une autre, chaque soir durant environ deux semaines.
Extrait de « Les coutumes de nos ancêtres », auteur Yvon Desautels,
Autorisé par l’éditeur Éditions Paulines, 1984/médiaspaul www.mediaspaul.ca